le plan de la personne P1
La société n’existe pas. Il y a seulement des individus et des familles », disait Margaret Thatcher en 1987. Si elle n’a jamais brillé par sa finesse, Maggie n’était pas non plus bête à manger du foin. Alors pourquoi sortir une telle énormité ? Eh bien justement au nom d’une évidence à laquelle la dame croyait dur comme fer.
La famille et l’individu sont des entités qui, selon elle et le premier chapeau melon de la City venu, se constatent. Qui penserait à en nier l’existence ? Comment pourrais-je nier ma propre existence ? Je pense que je suis et ça suffit pour que j’existe. Et ma famille avec, un papa, une maman, les liens du sang et tout le toutim. La société en revanche, c’est déjà beaucoup plus abstrait. A tel point que la Dame de fer, chantre du néolibéralisme, la supprime de son champ de vision. Par provocation sans doute mais pas que. D’ailleurs sans lui donner raison, si nous observons autour de nous, la société ne se voit pas, ne se palpe pas.
Par contre, ce que nous constatons, ce sont des individus biologiquement liés et constitués en familles. Ce qui correspond bien à la définition de Wikipédia : « Un individu est un objet d’un ensemble prédéfini. » Selon le Dictionnaire de l’Académie française, c’est « une unité organisée ». Tout cela reste bien vague. Une plante ne répond-elle pas à l’appel ?
Toujours selon Wikipédia, dans le langage courant, il s’agit le plus souvent d’une personne, et le terme (individu) peut avoir des acceptions sensiblement différentes suivant les disciplines. Et c’est là que le bât blesse : que signifie le plus souvent ? Et les acceptions sensiblement différentes ?
Dernière tentative de précision du côté de la Toupie, une petite encyclopédie du Web à laquelle j’accorde un certain crédit. Mais là, pour individu, pas de définition. C’est individualisme qui répond à ma demande et l’article commence ainsi :
Etymologie : dérivé de individu, issu du latin individuus, indivisible, inséparable, lui-même composé du préfixe privatif in- et de dividuus, divisible, divisé, partagé, séparé.
L’individu est donc l’indivisible, pas spécialement humain, ni même animal, mais vivant en tous cas, de l’homme jusqu’aux êtres unicellulaires. D’ailleurs, si on le découpe jusqu’à un certain point, l’individu dépérit et change de règne, meurt et retourne à la poussière minérale ou à l’agrégat pierreux.
Si vous avez de la mémoire, cela vous rappellera sans doute le chapitre M5 intitulé « L’incorporation sans se forcer ». Celui-ci se terminait sur l’idée que l’individu relevait de la biologie et que l’animal accédait au statut de sujet. Aucun rapport grammatical ni même de subordination cependant. Ce sujet-là est sexué et susceptible de rapports sexuels et par conséquent potentiellement impliqué dans une relation de procréation, d’engendrement et d’élevage.
Tout le reste est littérature ! A la revoyure !
Pour aller plus loin :
Dans La Dissociété (p.283-291), Jacques Généreux se livre à une étude de l’origine de cet « atome humain » sur lequel repose la philosophie libérale. Il montre qu’il s’agit d’un postulat sur lequel personne ne s’est vraiment penché pour la simple raison qu’il faut bien démarrer quelque part. Mais ce déjà-là pose problème parce qu’il renvoie à de vieilles croyances, des a-priori ontologiques faciles à admettre mais fallacieux.